Chandelle, localité longtemps considérée comme un symbole de résistance contre les groupes armés dans le département de l’Artibonite, est désormais passée sous le contrôle du gang « Gran grif » de Savien. L’attaque, survenue le jeudi 16 octobre 2025, a mis fin à plusieurs mois de lutte acharnée menée par les habitants et les membres de la coalition populaire de défense locale.
Selon des témoins et des leaders communautaires, les assaillants ont bénéficié du renfort de leurs alliés du groupe « Viv ansanm » pour prendre le contrôle du territoire. De nombreuses maisons ont été incendiées, des animaux volés et des dizaines de familles ont fui vers Saint-Marc pour échapper aux violences. Les images publiées sur les réseaux sociaux montrent les ravages laissés par les affrontements, alors que les bandits revendiquent ouvertement leur victoire.
Un responsable religieux de la zone, sous couvert d’anonymat, a confié que la chute de Chandelle s’explique en partie par le manque de munitions et d’équipements. « Les combattants n’avaient plus de quoi résister. Ils se sont repliés pour éviter un massacre », a-t-il déclaré. Chandelle, située entre Liancourt et Verrettes, représentait jusqu’ici une position stratégique dans la résistance paysanne contre la progression des gangs dans le Bas-Artibonite.
Pour la juriste et journaliste Christianne Jean-Mary, cette défaite a des conséquences alarmantes sur la sécurité régionale. « Les communes de Verrettes et de Saint-Marc sont désormais exposées. Le gang de Savien a élargi son champ d’action jusqu’au mont Tapyon, rendant la route du Centre encore plus vulnérable », a-t-elle expliqué, appelant à une coopération urgente entre la Police nationale d’Haïti (PNH) et les structures communautaires de défense.
De son côté, André Saint-Louis, coordonnateur général du Komite inisyativ pou lapè nan ba Latibonit (KILBA), a dénoncé l’inaction des autorités et le manque de soutien des acteurs économiques. « L’effondrement de Chandèl était prévisible. Nos combattants ont été laissés seuls, sans ressources ni appui de l’État », regrette-t-il. Il s’indigne également de voir « des entrepreneurs locaux verser de fortes sommes aux gangs pour assurer la circulation de leurs marchandises, tout en ignorant les efforts de ceux qui risquent leur vie pour défendre la région ».
La prise de Chandelle marque un tournant dramatique dans la guerre territoriale qui secoue l’Artibonite. Malgré les récentes réaffectations au sein de la PNH, les groupes armés continuent d’étendre leur emprise, tandis que les habitants des zones rurales vivent dans la peur et l’incertitude d’un lendemain toujours plus fragile.
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