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Justice

Le Barreau de Port-au-Prince dénonce une « fraude constitutionnelle » et met en garde contre le projet référendaire

Port-au-Prince, 29 août 2025 – Dans un document d’analyse de onze pages rendu public, le Barreau de l’Ordre des avocats de Port-au-Prince, par la voix de son bâtonnier Patrick Pierre-Louis, a pris position contre l’avant-projet de Constitution transmis par le Comité de pilotage de la Conférence nationale au pouvoir exécutif.

Les juristes parlent d’une « fraude constitutionnelle », dénonçant un texte produit sans légitimité ni habilitation, en violation directe de la Constitution de 1987. Selon l’Ordre, l’article 284-3 de la Constitution interdit formellement toute révision par voie référendaire, ce qui rend illégal le processus engagé. Le Barreau souligne que le comité chargé de la rédaction du document n’a reçu ni mandat du peuple ni reconnaissance constitutionnelle pour entreprendre une telle tâche. Ce déficit de légitimité, combiné à de graves irrégularités juridiques et procédurales, conduit l’institution à rejeter catégoriquement l’avant-projet.

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Dans son avis, le Barreau insiste sur les faiblesses internes du texte : contradictions, incohérences terminologiques et failles techniques qui, selon lui, rendent impossible son adoption comme base de l’organisation des pouvoirs publics. L’institution va plus loin en affirmant qu’au-delà des aspects juridiques, les conditions actuelles ne permettent aucunement la tenue d’un référendum. L’insécurité persistante, les déplacements massifs de population et l’effondrement institutionnel rendent illusoire toute consultation électorale crédible.

Le Barreau rappelle une vérité qu’il juge incontournable : « Ce qui était illégitime sous le président Jovenel Moïse ne saurait devenir légitime aujourd’hui, à moins d’inventer une théorie de la mort absoluttoire », formule qui souligne la continuité de l’illégalité.

Parallèlement, des révélations publiées par le média Rezo Nòdwès mettent en lumière une stratégie du régime de transition dirigé par Saint-Cyr et Fils-Aimé. Selon ces informations, le pouvoir aurait volontairement neutralisé le Conseil électoral provisoire pour mieux contrôler le calendrier et mettre en place une « machine électorale » en vue d’un référendum annoncé pour novembre. Des conseillers électoraux, tel Jacques Roche, sont accusés d’avoir rejoint la manœuvre et devraient être déployés dans les départements dès cette semaine, illustrant une tentative d’ancrer artificiellement le processus sur le territoire.

Ces agissements renforcent les critiques qui dénoncent un simulacre démocratique, une mise en scène destinée à donner une apparence populaire à une initiative dépourvue de légalité. Plusieurs observateurs parlent déjà d’un « référendum de façade », conçu pour légitimer un projet imposé par le sommet de l’État et appuyé par certaines forces internationales.

L’opposition est désormais nette : d’un côté, le Barreau de Port-au-Prince qui plaide pour le respect strict de la Constitution de 1987 et de la légalité républicaine ; de l’autre, un pouvoir de transition accusé de manœuvres opportunistes et de dépendance vis-à-vis de directives venues de l’étranger. Au fond, le débat dépasse la seule question d’un avant-projet de Constitution. Il engage la souveraineté même de l’État haïtien, appelé à choisir entre la continuité de l’ordre constitutionnel et l’acceptation d’arrangements politiques fragiles, dictés par des logiques exogènes.

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Jean Rony Poito PETIT FRERE

Journaliste

Journaliste-rédacteur & professeur de sciences sociales. Passionné de la rédaction.

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