Les repas servis aux policiers haïtiens sont devenus un problème de santé publique au sein de la PNH. Dans plusieurs unités, des agents se voient obligés de prendre du Lopéramide pour prévenir les troubles digestifs causés par la mauvaise qualité de la nourriture. Derrière ces dysfonctionnements, des contrats de cantine entachés de corruption et de fraudes administratives mettent en lumière un scandale systémique.
Les témoignages recueillis par AyiboPost décrivent des repas déséquilibrés et dangereux pour la santé. Riz mal cuit et en quantité excessive, poulet importé mal préparé et boissons sucrées répétitives font partie du quotidien des cantines. Certains policiers souffrant de maladies chroniques, comme le diabète, sont particulièrement exposés. Face à ces conditions, plusieurs agents refusent de consommer les repas et dénoncent un manque de rigueur dans la gestion alimentaire.
L’appel d’offres pour ces services de restauration, lancé en juillet 2024, avait pour objectif de fournir de manière transparente des cantines aux unités spécialisées et aux aspirants de l’École nationale de police. Au total, onze entreprises ont été retenues pour un marché évalué à près de quatre milliards de gourdes. Mais une commission indépendante, composée de représentants du ministère de la Justice, d’avocats et de membres de la société civile, a révélé de graves irrégularités dans l’attribution de huit des onze lots.
Sur le terrain, les enquêteurs ont constaté que plusieurs entreprises gagnantes n’existent pas aux adresses déclarées. Des sociétés comme Food et Cook, Au Plaisir des Saveurs, Spirale Gourmande ou Club Gourmet se sont avérées introuvables, tandis que d’autres utilisent des documents officiels postdatés ou comportant des numéros consécutifs suspects. Dans certains cas, la direction des sociétés indiquée dans les dossiers ne correspond pas à la réalité. Ces anomalies suggèrent une manipulation coordonnée des documents pour obtenir les contrats.
Le rapport de la commission révèle aussi des liens inquiétants entre plusieurs prestataires. Des procurations bancaires partagées, des attestations de crédit délivrées le même jour et des noms de propriétaires apparaissant dans plusieurs dossiers pointent vers un réseau de collusion. Les sociétés Fushia et Decorati, par exemple, semblent étroitement liées, partageant des représentants et des documents identiques. Ces pratiques compromettent la concurrence et concentrent les marchés entre les mains d’un petit nombre d’acteurs.
Alors que la corruption siphonne des milliards de gourdes, les policiers continuent de subir les conséquences directes de ces irrégularités. Entre repas indigents et contrats truqués, la cantine de la PNH est devenue un symbole inquiétant de l’atteinte à la santé et à la dignité de ceux qui assurent la sécurité des Haïtiens.
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