L'ambassadrice Myrtha Désulmé a tiré la sonnette d’alarme, mardi 29 juillet, devant le Groupe des amis d’Haïti réuni au siège de l’OEA. Dans un discours empreint de gravité, la représentante permanente d’Haïti a dressé un tableau sombre de la situation du pays, marqué par l’effondrement sécuritaire et une crise humanitaire sans précédent.
« Sans sécurité, pas de transition, pas d’élections, pas d’avenir », a-t-elle lancé d’entrée, appelant à une solidarité internationale « concrète, rapide et audacieuse ». Selon elle, le chaos s’enracine : les gangs armés contrôlent près de 90 % de Port-au-Prince, et leur influence s’étend désormais à l’Artibonite et au Centre.
La violence est hors de contrôle. En 2024, plus de 5 600 personnes ont été assassinées. Des viols publics, des enlèvements quotidiens, des axes routiers coupés, des institutions fermées ou détruites. L’aéroport international de la capitale reste inutilisable, et l’État haïtien, chassé de ses propres bâtiments, peine à exister sur le terrain.
Les conséquences humanitaires sont lourdes : 1,3 million de déplacés internes, 5,7 millions de personnes en insécurité alimentaire, une économie en récession depuis six ans, une inflation galopante, un chômage de masse. Et, souligne la diplomate, ce tableau s’alourdit encore par les vagues de déportations de ressortissants haïtiens, y compris depuis des pays dits « amis ».
Malgré les efforts de la Police nationale d’Haïti, des Forces armées et du contingent de la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS), les moyens restent insuffisants. « Il faut agir vite », a insisté l’ambassadrice, rappelant que le Conseil présidentiel de transition s’est engagé à organiser des élections d’ici février 2026. Tout retard pourrait mener à un vide institutionnel, a-t-elle prévenu. Mais au-delà de la sécurité, Mme Désulmé plaide pour une refonte en profondeur des politiques de développement. « Haïti a reçu de l’aide pendant des décennies et reste dans la misère. Il est temps de faire autrement », a-t-elle déclaré, appelant à investir dans la production locale et l’autonomisation des Haïtiens.
Elle a salué la résolution adoptée en juin par l’OEA, confiant à l’organisation un rôle accru dans la réponse à la crise haïtienne. Un avant-projet de plan d’action a déjà été soumis au gouvernement haïtien, qui doit y intégrer ses priorités dans les jours à venir.
En conclusion, l’ambassadrice a convoqué l’histoire, rappelant le rôle de la jeune République d’Haïti dans la libération de l’Amérique latine. « Avec une vraie volonté politique, nous pouvons vaincre ce cauchemar. Mais il faut agir maintenant. »
0 Commentaire