Des images et des vidéos faisant le tour des réseaux sociaux montrent des actes odieux, avilissants, choquants infligés aux migrants haïtiens pourchassés en pleine rue, tabassés parfois exécutés sur le sol dominicain. Ils sont tous les jours brutalement traqués et déportés par milliers. Tout ceci se passe dans une quasi-indifférence générale. On n’entend ni protestation ni condamnation. Tout ce que ces compatriotes (environ un demi-million, selon le GAAR) vont chercher là -bas, c’est ce que l’État d’Haïti n’offre plus à ses citoyens : le travail, la santé, l’éducation, et des opportunités.
Mon cœur de patriote saigne à voir coulé notre sang dans les rues de la terre dominicaine. A voir notre drapeau piétiné, souillé par des extrémistes dominicains, mon âme pleure. A voir des femmes enceintes enlevées des lits d’hôpitaux et obligées de donner naissance dans l’indignité au coin d’une rue, je suis ému au plus profond de mes entrailles. Récemment, Loudya Jean Pierre (32 ans) est morte après avoir accouché à la maison. Son compagnon et le nouveau-né ont été expulsés, le cadavre séquestré. Deux nourrissons ont été également rapatriés en Haïti sans les mères.
A savoir que mes compatriotes doivent vivre en reclus pour échapper aux rafles et à la chasse de soldats dominicains me met en colère et me rappelle le massacre perpétré sur nos frères et sœurs en 1937 ! A savoir que dans les bateyes, nos viejos vivent dans des cabanes en terre et sont retenus dans les champs de canne me renvoient au temps de la colonie. Chaque jour, nous sommes témoins du traitement inhumain infligé à nos sœurs et à nos frères, des actes odieux et dégradants perpétrés à l’encontre de nos compatriotes se trouvant sur le sol de la République Dominicaine.
Ces actes nous disent que quelque chose ne marche pas chez nous, en Haïti. -Nous devons, côté haïtien de l’île Hispaniola (la République d’Haïti et la République Dominicaine), faire les choses autrement. Nous devons mettre fin à la corruption et à l’injustice. -Nous devons mieux gérer nos ressources et notre pays afin de garantir une place à chacun. -Nous devons diriger en bons patriotes-serviteurs pour redonner sa grandeur à la Première République noire au monde formée par des anciens esclaves. L’humiliation faite chaque jour à notre drapeau devrait nous inciter à revenir sur notre histoire pour y puiser des motifs de fierté et de dignité, pour écrire de nouvelles pages dignes de notre passé.
Depuis quelques décennies, nous avons perdu le chemin de la dignité et de l’honneur. Depuis un demi-siècle nous avons perdu le sens de l’organisation de notre société. Nous avons perdu nos repères ainsi que nos valeurs traditionnelles, le kumbitisme (l’entraide), la solidarité, le respect, et ce génie qui faisaient de nous un peuple doté de grandes qualités. Haïti est à la croisée des chemins. Que faisons-nous de ce beau pays doté de montagnes majestueuses ? Que faisons-nous de ces belles plages qui bordent notre mer turquoise De nos terres fertiles que faisons-nous ? De ces beaux paysages variés, de cet environnement naturel qui attire et accroche le visiteur, qu’allons-nous faire ? De notre culture profonde, de notre patrimoine historique, de nos sites merveilleux, de nos grottes mythiques, de notre culture riche et profonde, que faisons-nous ? Que ferons-nous pour sauver notre jeunesse ?
Face aux brouillards qui assombrissent l’horizon, et devant l’absence de perspective de changement, des centaines de milliers de jeunes ont fui le pays au cours des trente dernières années. Par vagues successives, ils sont partis au Brésil, au Chili, sur les frontières du Mexique, aux USA ou en République Dominicaine. Combien sont-ils ? Comment vivent-ils ? Reviendront-ils un jour ? Il n’y a pas de mesures, ni de politique publique qui apportent une réponse aux drames que vivent les jeunes, qui leur donnent le gout de vivre au pays.
-Nous devons entendre l’appel des ancêtres qui nous disent que cette terre est sacrée nous devons tout faire pour la protéger et la faire prospérer. -Nous devons reconnecter avec notre mémoire, notre culture, et nos traditions. -Nous devons agir vite et ensemble pour reprendre le chemin de notre histoire, et retrouver notre destin avec un Leadership collectif basé sur la cohésion sociale, l’intégrité et le patriotisme. -Nous devons signer un « Pacte pour une renaissance collective » qui nous engage à l’union et à la réconciliation, au développement et au progrès pour toutes et tous. -Notre pays est en difficulté. Oui, mais n’oublions pas qu’Haïti est une terre de lumière, de liberté, et d’espoir.
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