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Russie: un chercheur français condamné à trois ans de prison

Le chercheur français Laurent Vinatier a été condamné lundi à Moscou à trois ans de prison pour avoir collecté des données militaires sans s'être enregistré comme « agent étranger », un statut contraignant à de lourdes démarches administratives. Arrêté le 7 juin dernier dans un restaurant moscovite, ce spécialiste de l'espace post-soviétique âgé de 47 ans travaillait pour une ONG basée en Suisse spécialisée dans la médiation des conflits hors des voies diplomatiques officielles.

A ce titre, il entretenait de nombreux contacts et effectuait régulièrement des voyages en Russie et en Ukraine, avant même l'invasion russe de février 2022. Lors des précédentes audiences, il avait plaidé coupable dans le cadre d'une procédure simplifiée ouvrant la voie à une réduction de peine. Ses avocats qui réclamaient une simple amende ont dénoncé lundi une peine «excessivement sévère», annonçant qu'ils allaient faire appel.

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Pouchkine n’a rien pu faire. Lorsque, derrière les barreaux de la cage du petit tribunal du district de Zamoskvoretsky, à Moscou, Laurent Vinatier a, lundi 14 octobre, conclu sa défense en citant le grand poète russe, la juge l’a regardé droit dans les yeux. Otage de facto du bras de fer entre le Kremlin et Paris, le Français de 48 ans, spécialiste de l’espace post-soviétique, arrêté à Moscou le 6 juin et poursuivi depuis pour ne pas s’être enregistré en tant qu’« agent de l’étranger », a reconnu sa culpabilité « pleine et entière ». Mais, droit dans sa chemise bleue, le regard à la fois sévère et charmeur, ce père de famille a expliqué « être tombé amoureux de la Russie il y a vingt ans ».

Marié à une femme russe, il ne cessait de voyager à Moscou et Saint-Pétersbourg pour organiser la « diplomatie parallèle » menée par l’organisation suisse Centre pour le dialogue humanitaire (HD), son employeur depuis huit ans. Les mains légèrement tremblantes, il a demandé à la juge un « verdict indulgent et équitable ». Puis, alors que la procureure venait de requérir trois ans et trois mois de prison ferme à son encontre, Laurent Vinatier a soudain laissé de côté ses quelques feuilles A4 où il avait griffonné ses phrases de défense. Et, de mémoire, il a cité Pouchkine devant la juge visiblement interloquée : « Si la vie te trompe… Sois résilient un jour de peine. »

Une heure après, la juge Natalia Tcheprassova était de retour dans la salle du tribunal. Le regard sec plongé dans ses trois pages de jugement, elle a lu à toute vitesse son verdict : trois ans de prison ferme pour Laurent Vinatier. Soit trois mois de moins que ce demandait la procureure. Mais loin de ce qu’espéraient les avocats du Français : ils plaidaient une simple amende pour ce crime à la gravité toute relative.

Pour Paris, la législation «concourt à abolir les derniers espaces de liberté dont disposaient la société civile, les médias indépendants et les oppositions politiques en Russie» et «va à l'encontre des engagements auxquels la Russie a souscrit en matière de droits de l'Homme». Les autorités françaises se disent «pleinement mobilisées pour lui porter assistance».

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